Gabriel Attal gonfle le « progrès colossal » de sa réforme du RSA !

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40 % des allocataires du RSA bénéficiant d’un « accompagnement rénové » ont trouvé un emploi, vante Matignon. Une communication prématurée car la réforme lancée depuis l’an dernier ne porte que sur un petit échantillon.

 

C’est l’une des réformes majeures du deuxième quinquennat Macron. Le retour à l’emploi des allocataires du RSA, objectif principal de la loi pour le plein-emploi, a été adopté en décembre 2023.

Signe des attentes élevées de l’exécutif, le Premier ministre, Gabriel Attal, s’empresse déjà d’afficher les premiers résultats positifs de cet accompagnement dit « rénové ». Et dont la principale nouveauté est l’obligation imposée aux bénéficiaires du RSA de réaliser 15 à 20 heures d’activités hebdomadaires favorables à leur réinsertion.

Selon le chef du gouvernement, la réforme serait déjà « un progrès colossal ». Le communiqué de Matignon indique que 21 300 allocataires du RSA sont concernés par les nouvelles modalités d’accompagnement dans les 18 départements qui ont testé le nouveau parcours, au sein de bassins d’expérimentation. Et qu’en matière de retour à l’emploi, « 40 % des personnes accompagnées ont accédé à un emploi dans les cinq mois suivant leur entrée en parcours ».

Un échantillon de 4 800 personnes

Or cette présentation est légèrement fallacieuse. Car les statistiques d’accès à l’emploi présentées par Matignon ne sont pas mesurées sur cette base d’allocataires. Sollicité par Alternatives Economiques, France Travail (ex-Pôle emploi) nous précise n’avoir du recul que sur un plus petit nombre de personnes : celles qui sont entrées dans le parcours entre mars et juillet 2023.

Sur cette période, ce sont en réalité 4 677 personnes qui ont démarré un parcours de réinsertion sociale et professionnelle, d’après le tableau de bord de suivi des expérimentations, disponible en ligne. Un petit nombre qui correspond à l’amorçage de la réforme… 

Les 21 300 personnes mentionnées par Matignon couvrent, elles, toutes les inscriptions cumulées jusqu’à février 2024. Trop tôt, donc, pour dresser un bilan quantitatif sur cette masse de personnes.

Quant au pourcentage d’accès à l’emploi, il a été mesuré cinq mois après le début de l’accompagnement. Une proportion qu’il n’est pas possible de vérifier dans le même tableau de bord, car celui-ci a continué d’être mis à jour après les cinq mois de parcours, nous précise France Travail.

A première vue, le chiffre apparaît néanmoins prometteur. Il suggère une remise au travail plutôt rapide pour 4 bénéficiaires du RSA sur 10. Ce qui semblerait cohérent avec la réforme puisque celle-ci prévoit un suivi plus intensif effectué par les conseillers d’insertion.

Une statistique à l’instant T

Cependant, dans la majorité des cas, ces emplois sont courts. Seuls 14 % des emplois retrouvés sont durables (CDD de six mois et CDI). Mais surtout cette statistique n’est que le reflet à l’instant T d’une réforme qui ne bénéficie qu’à un tout petit échantillon.

A peine inscrites au RSA, ces personnes sont déjà accompagnées. Elles bénéficient d’un traitement de faveur si on le compare à la situation globale des allocataires du RSA avant la réforme. Dans son rapport de janvier 2022, la Cour des comptes rappelait que les contacts avec les référents pouvaient parfois être limités à deux ou trois par an, mails compris.

Lors de la généralisation du dispositif, les personnes suivantes bénéficieront-elles de la même intensité d’accompagnement susceptible d’améliorer leurs chances de retour à l’emploi ? Qu’en sera-t-il lorsque sera intégré le « stock » de personnes dépourvues d’emploi depuis des années ?

Si le gouvernement veut tenir la cadence en termes de qualité de suivi, cela nécessitera d’importants investissements en effectifs de conseillers. Et il n’est même pas sûr que ces efforts parviennent à éradiquer l’exclusion du marché du travail d’une partie des allocataires, si l’on considère, comme l’économiste Anne Eydoux, que le problème de fond reste l’absence d’emplois en nombre suffisant.

Pour rappel, fin 2022, 2,1 millions de personnes étaient bénéficiaires du RSA.

« Une expérimentation peut donner de bons résultats en améliorant les chances des personnes accompagnées par rapport à celles qui ne le sont pas. Mais sa généralisation mettra tout le monde en concurrence pour un même volume d’emplois », nous rappelait, dans un précédent article, la maîtresse de conférences en économie du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam).

 

Source : https://www.alternatives-economiques.fr/gabriel-attal-gonfle-progres-colossal-de-reforme-rsa/00109991



21/03/2024
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