RSA : la Seine-Saint-Denis se retire de l'expérimentation « France Travail »

Le département le plus pauvre de France métropolitaine a finalement décidé de ne pas participer à l'expérimentation, qui prévoit de conditionner le versement du RSA à l'exercice de 15 à 20 heures d'activité hebdomadaire. Son président, Stéphane Troussel invoque une divergence de conception du rôle des aides sociales.

 
Stéphane Troussel, le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis, ne participera pas à l'expérimentation « France Travail ».
Stéphane Troussel, le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis, ne participera pas à l'expérimentation « France Travail ». (Nicolas Messyasz/Sipa)

Par Leo Da Veiga

« Nous n'avons pas la même conception des aides sociales ». Le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel (PS), a annoncé, lundi 27 mars, par le biais d'un courrier officiel envoyé au ministre du Travail, Olivier Dussopt, qu'il ne participera finalement pas à l'expérimentation du dispositif « France Travail ».

Promesse de campagne du candidat Emmanuel Macron, ce projet prévoit de renforcer l'accompagnement vers l'emploi des allocataires du RSA. En contrepartie, ceux-ci doivent s'engager à exercer 15 à 20 heures d'activité par semaine, sous peine de suppression de leurs allocations.

En décembre, le ministère du Travail avait annoncé intégrer 19 départements dont la Seine-Saint-Denis, dans le dispositif expérimental. Le département le plus pauvre de France métropolitaine, qui compte 85.000 bénéficiaires du RSA, avait alors freiné des quatre fers. La collectivité voulait des garanties concernant l'accompagnement et la gestion des sanctions en cas de manquements.

« Jouer le jeu des négociations »

 
« Nous sommes défavorables à ce principe. Mais en septembre, les représentants locaux de l'Etat ont tenté de nous rassurer, insistant sur le principe d'un accompagnement plus fort, sans réelle sanction en cas de manquement à ces heures d'activités », assure Stéphane Troussel qui dit avoir « joué le jeu des négociations » avec l'Etat.

L'élu prend aujourd'hui acte d'une divergence de points de vue. « La goutte d'eau a été le discours présidentiel de la semaine dernière, quand Emmanuel Macron a déclaré qu'il souhaitait 'aller chercher ces bénéficiaires et les responsabiliser'. Pour nous, c'est inacceptable, car le RSA est un droit social fondamental », martèle-t-il.

« C'est un choix politique du 93 », a réagi auprès de l'AFP le haut-commissaire à l'emploi, Thibaut Guilluy. Ce dernier aurait montré des signes d'ouverture, assurant que les heures d'activité obligatoire pourraient aussi bien concerner un travail que des cours de sport, du bénévolat ou même les démarches d'obtention d'une carte Vitale. Mais il réfute toute dépossession des pouvoirs de sanction ou même d'orientation des bénéficiaires du RSA du département au profit de Pôle emploi.

« Pas de sanction automatique »

« Le RSA est conditionné. C'est aujourd'hui donc déjà le cas dans la loi, mais dans le cadre d'une promesse uniquement formelle et vide de sens pour les usagers. Avec ces expérimentations, nous donnons les moyens à l'Etat et aux collectivités d'apporter un réel accompagnement aux allocataires », explique le haut-commissariat. « Le projet de loi n'envisage donc pas de sanction automatique tandis que, pour les allocataires du RSA, la décision finale relèvera bien du président du conseil départemental », indique-t-il également, assurant « vouloir harmoniser les régimes de sanction de Pôle emploi et des départements ».

La gestion du RSA est un dossier crucial pour la Seine-Saint-Denis, engagée depuis quelques mois dans un processus de renationalisation partielle du financement pour lequel elle a topé avec l'Etat. En contrepartie d'un allègement des charges, le département s'est engagé à renforcer l'accompagnement, faisant passer ses moyens dédiés de 23 à 46 millions d'euros.

Désireux de garder la main sur cet accompagnement, Stéphane Troussel met donc en garde contre le processus d'inscription automatique des bénéficiaires du RSA à Pôle emploi, qui risquerait, selon lui, d'entraîner erreurs et radiations massives. L'élu juge également le calendrier trop rapide : un projet de loi de généralisation serait annoncé pour l'été, alors que l'expérimentation n'a pas encore démarré dans les départements. Selon le haut-commissaire, elle devrait cependant démarrer dès le courant du mois d'avril.

Léo Da Veiga

https://www.lesechos.fr/pme-regions/ile-de-france/rsa-la-seine-saint-denis-se-retire-de-lexperimentation-france-travail-1919623



11/04/2023
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